Les Livres
Angèle - Pirouettes
Titre: | Angèle - Pirouettes |
Catégorie: | Littérature français (romans grand format) |
LivreID: | 539 |
Auteurs: | Marcel Pagnol |
ISBN-10(13): | 2-4272-5019-2 |
Editeur: | France loisirs |
Date de publication: | 01.01.1991 |
Nombre de pages: | 287 |
Langue: | Français |
Evaluation: |
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Description: |
Angèle : Dans le pays, quand on a besoin de régler un différend, plutôt que de s'adresser au juge de paix, on va trouver Clarius Barbaroux si grande est la réputation de sagesse du maître de la Douloire: la ferme qu'il exploite dans les collines au-dessus de Marseille avec sa, femme Philomène, sa fille Angèle et son valet Saturnin. Saturnin est tout dévoué à la famille, mais c'est pour Angèle qu'il est prêt à se jeter au feu; il l'a vue grandir et trouve qu'aucun garçon du pays n'est assez bon pour elle. Est-ce de s'être entendu répéter que seul « un monsieur de la ville » était digne d'elle? Quand il s'en présente un, Angèle n'hésite pas à quitter les siens pour le suivre. Saturnin apprend son adresse par hasard. Si grande est sa naïveté qu'Angèle doit lui expliquer ce qu'elle est devenue en réalité à Marseille entre les mains de « Monsieur Louis ». Son cœur simple résout le problème de la façon la plus radicale et il ramène Angèle à la ferme. Le drame a commencé là chez ces fiers gens de Provence que Marcel Pagnol décrit si bien dans ce scénario qui a été un de ses très grands succès.
Pirouette : Ne ris pas ainsi, petit malheureux ! Cesse tes grimaces navrantes et ce rictus d'aliéné ! Oui, j'ai dit au beau-père un petit mensonge. Mais j'y étais forcé ! Il vida sa pipe en la frappant sur son talon. - Je lui ai dit que j'étais chimiste. Mon rire reprit de plus belle. - Mais que signifient ces ricanements ? s'écria-t-il avec colère. Écoute-moi ! Lucie me présente à son père : "Monsieur Peluque, chimiste distingué." Je te jure que je ne lui avais rien dit de semblable. Mais elle me croyait chimiste, voilà le fait. - Tu n'avais qu'à tourner une phrase sur la philosophie, qui est la chimie de l'âme, ou le creuset de l'introspection. Tu aurais mis au point, sans la froisser. - Je ne l'ai pas fait. D'abord, ce titre de chimiste me plaisait parce qu'il ne m'appartenait pas ; tu sais que j'aime beaucoup essayer les chapeaux des autres. Et puis, le beau-père me répond : "Chimiste ? Très bien ! Obus, poudre, cartouches, science, utilité, avenir ! J'avais craint que vous ne fussiez un poète, un mangeur de verbes, morale, philosophie et tout le bazar. Mes félicitations, jeune homme !" Je ne pouvais plus reculer ! - Que fait-il dans la vie, ton beau-père ? - Capitaine, pour se distraire, bien entendu. Il laisse sa solde à la caisse de retraite des officiers ; car tu penses bien qu'avec la fortune qu'il a... Et il est très délicat, il ne me l'a pas dit ; je l'ai compris à demi-mot. - Et tu lui as affirmé que tu gagnais de l'argent ? - Je lui ai dit que j'allais me présenter en juillet à la troisième partie de ma licence de chimie. On nous mariera quand je serai reçu. - On ne vous mariera donc jamais. Il eut un sourire malicieux. - Connais-tu mon cousin Henri Peluque, de Tarascon, qui habite ici tout seul, pour se présenter à ladite licence de chimie ? Il a les deux premières parties. Quand il sera reçu à la troisième, je montrerai les résultats au beau-père, charmé, et on nous mariera. - Mais après ? Tu seras bien obligé de dire que tu n'es même pas bachelier, et que tu ignores jusqu'à la formule de l'alcool, dont tu es d'ailleurs saturé ! - C6 H5 OH, dit-il gravement. Après j'aurai la fille et l'argent. J'avouerai froidement au beau-père que je suis philosophe, et avec le caractère que je lui connais, j'aurai une belle occasion de le prouver ! - Il y a un grand danger. Si ton cousin échoue à sa licence ? C'est un garçon très intelligent, mais qui court le guilledou, et ne travaille guère ! - Plus maintenant ! dit Peluque en clignant de l'œil. - Quoi ? Son père serait-il ici ? - Presque, car je le surveille, ce cousin bien-aimé ! À la moindre incartade, j'écris chez lui. Je fus indigné. - Et quelle opinion veux-tu que l'on ait de toi, en te voyant faire ce métier d'espion ? - On ne sait pas que c'est moi ! - Quoi ! Tu écris des lettres anonymes ? - Oh ! Fit-il d'un air de reproche. Mes lettres ne sont pas anonymes ! Je signe : "Tom Barclay, caporal à l'Armée du Salut". Et d'ailleurs, c'est pour son bien. Quand il sera reçu, je lui avouerai tout. Alors, il me dira : "Louis-Irénée, tu m'as sauvé". Et il lubrifiera de larmes reconnaissantes la charnière de mes genoux. |